Depuis la seconde révolution industrielle, les méthodes de management se sont toujours adaptées aux contraintes des différentes époques : nécessité de produire en masse, d’améliorer la satisfaction client, d’améliorer la performance organisationnelle … Aujourd’hui, les contraintes avec lesquelles ces méthodes doivent composer intègrent la complexité et l’incertitude d’un monde en constante transformation [1]. Instabilité des marchés, élargissement du jeu concurrentiel, bouleversement des modes de travail … le changement est partout ! Contrainte ou opportunité ? Tout dépendra, entre autres, de la posture des personnes qui dirigent …
L’incertitude comme obstacle à la quête de maîtrise
C’est un fait que les chercheurs et praticiens de la psychologie connaissent bien : nous avons besoin de contrôler notre environnement et de nous sentir efficaces. Ce besoin est d’ailleurs considéré par la plupart des modèles et théories de psychologie comme l’un de nos besoins fondamentaux. Le besoin de maîtrise est en effet à la base de notre compréhension du monde et de ses règles, mais aussi de notre motivation à entrer en action [2, 3]. Difficile, en effet, de s’engager dans un processus coûteux sans avoir un minimum de certitude quant aux conséquences de nos actions.
L’incertitude qui caractérise aujourd’hui le marché du travail va justement à l’encontre que cette quête absolue de contrôle et de maîtrise. Or cette part aujourd’hui incontournable de la fonction de management est peu (voire pas) inclue dans les visions traditionnelles du management. En résulte un sentiment d’insécurité, qui peut avoir des conséquences importantes sur la gestion d’une équipe et la pérennité d’une entreprise. Dans ce cas, l’incertitude peut en effet inciter les managers à se retrancher en territoire connu et à refuser toute transformation, en érigeant un contrôle traditionnel comme garant de la sécurité. Cette incertitude peut également les inciter à se projeter trop avant dans le changement sans analyser la situation au préalable. Autant de raison de changer de vision sur l’incertitude, et de l’intégrer pleinement dans sa vision du management !
L’incertitude, un vecteur d’opportunité
Car l’incertitude n’est pas qu’une contrainte ! Correctement gérée, elle est même garante de la réussite d’un projet, voire du succès d’une organisation. Cela implique, de la part du management, de faire le deuil de la maîtrise absolue et d’accepter la part d’inconnu qui réside aujourd’hui dans toutes les organisations. Accepter cette part d’inconnu, c’est aussi comprendre que la résolution d’une situation complexe ne passe pas forcément par une décision précise, mais qu’au contraire il existe autant de manières de résoudre une situation que de managers. Lorsque l’on sort du schéma selon lequel la réponse à une question complexe se trouve quelque part et attend d’être trouvée, on entre alors dans un état d’esprit qui permet la créativité et l’innovation.
C’est justement à ce moment précis qu’intervient la conduite du changement. Cette pratique désigne justement un ensemble de pratiques qui permettent, non pas de refuser le changement ou encore d’y sauter à pieds joints sans réfléchir, mais justement de s’adapter à l’évolution de l’environnement tout en prenant le recul nécessaire.
Passer de la contrainte à l’opportunité
Mettre en place les pratiques liées à la conduite du changement, ainsi que la posture managériale qu’elle suppose, nécessite bien souvent l’accompagnement d’un professionnel qualifié, qui saura adapter ses conseils à la situation précise de l’organisation. Néanmoins, quelques conseils simples peuvent dans un premier temps aider le management à mieux gérer l’incertitude pour la transformer en catalyseur de créativité :
- Renforcer le sentiment de compétence de ses collaborateurs, mais aussi de soi-même : il est en effet plus facile de gérer les imprévus lorsque l’on a confiance dans ses capacités à y faire face [4]. Pour cela, il est important de valoriser ses collaborateurs, mais aussi de prendre conscience de ses propres réussites, même les plus invisibles.
- Créer un climat de sécurité psychologique au sein de son équipe, afin de permettre aux collaborateurs de se sentir autorisés à faire preuve de créativité sans être jugés [5]. Cela passe par la création d’un climat de confiance au sein de l’équipe, mais aussi par le renforcement du sentiment d’appartenance à un groupe commun.
- Promouvoir une posture managériale basée sur la prise de décisions collégiales et l’autonomie des collaborateurs, ce qui permet à l’équipe d’être suffisamment flexible en cas de difficulté [1].
En résumé ? L’incertitude fait désormais partie intégrante de la vie des organisations et doit, de fait, être pleinement intégrée à la gestion des équipes et des projets. Plutôt que de refuser toute transformation ou au contraire de vouloir tout réformer sans recul, il est important que les managers adoptent une véritable posture de conduite du changement basée sur des évaluations appropriées, de la confiance et de l’innovation. Un accompagnement par un professionnel qualifié fera ici toute la différence, pour permettre aux équipes d’aborder cette transition en toute sérénité.
Références citées :
[1] Brunet, L., & Longcote, E. (2018). Le management en situation de complexité et d’incertitude. Apport de la Recherche et Développement. Journal International de Technologie, de l’Innovation, de la Physique, de l’Energie et de l’Environnement, 4(1).
[2] Fiske, S. T. (2004). Social beings: A core motives approach to social psychology. 14-24. John Wiley & Sons.
[3] Deci, E. L., & Ryan, R. M. (2012). Self-determination theory.
[4] Bandura, A., Freeman, W. H., & Lightsey, R. (1999). Self-efficacy: The exercise of control.
[5] Mornata, C. (2014). La sécurité psychologique ou comment démystifier l’apprentissage en situation de travail. E., Bourgeois, & S., Enlart (Eds.), Apprendre dans l’entreprise, 177-191.